top of page
PLETOURN

JOUR DE NOËL AU "PÈRE LACHAISE" : le monde change vraiment…

Extrait du journal ----------------------------------------------------

Annie Prost en décembre 2011

----------------------------------------------------


Jour de Noël au « Père Lachaise » : le monde change vraiment…

Traversée de Paris désert pour une ballade au Père Lachaise. L’idée, faire un reportage sur les tombes des personnalités qui ont terminé leur histoire de vie dans ce cimetière. Je n’y suis jamais allée et, juste arrivée, je me heurte à un problème que je n’avais pas imaginé. Il y a certes un grand nombre de personnalités connues au Père Lachaise mais également un très très grand nombre de personnes inconnues ! Et les plans vous indiquent une vaste zone à explorer pour telle ou telle personnalité. Je n’ai jamais pu trouver Modigliani dans la zone 96.

Modigliani devenu « anonyme » au milieu d’au moins 300 tombes. Quelle blessure supplémentaire pour cet écorché vif qui n’a eu de cesse de se bagarrer pour se faire reconnaître à l’égal de Picasso qui ne supportait pas cette rivalité ! Rencontré deux jeunes étudiantes chinoises qui se dirigeaient fermement vers la tombe de Balzac grâce à une application de leur smartphone. Elles venaient de Shanghai, étudiaient l’allemand à Bonn et passaient la semaine de Noël à Paris. Elles avaient lu « Eu-génie Gran-det », me dirent-elles avec leur accent saccadé. Le monde a vraiment changé… Il y a à peine 40 ans, les télévisions du monde entier étaient inondées d’images de la révolution culturelle et du petit livre rouge de Mao brandi, tel un étendard, par les étudiants chinois. Aucun d’entre nous ne pouvait imaginer que les enfants de ces étudiants embrasseraient une autre révolution culturelle, celle de la communication internet mondiale avec smartphone et études en Europe.

Je suis sidérée, mais aussi ravie, car si Balzac est lu en Chine, on peut espérer que l’esprit critique se développera dans ce pays. Je leur ai conseillé de lire « Les illusions perdues » qui est pour moi un des romans de Balzac avec « La peau de chagrin » le plus universel et intemporel.


Dans « Les illusions perdues », la description du milieu et du système médiatique de l’époque de Balzac m’a impressionnée tant cette description est d’actualité. Comme me l’a dit Camille, quand je lui ai transmis un tableau de Balzac considéré comme très ressemblant par ses contemporains et que ce dernier n’aimait pas, « Balzac se voyait en dandy, ses contemporains le trouvaient vulgaire et grossier, mais c’était un génie ». Beaucoup de mes amis s’inquiètent du manque de culture de la société d’aujourd’hui. Ils n’ont pas compris que, comme il y a 100 ans ou 50 ans, une élite lettrée existe toujours, simplement elle n’est plus visible. Aujourd’hui c’est la « culture » de masse qui est visible car propulsée par les médias, en particulier la TV. A ce titre, il est intéressant de constater qu’à ses débuts, la télévision « publique » était dirigée par cette élite lettrée qui concevait les programmes dans la foulée de l’esprit de l’éducation nationale. Cette situation a perduré jusqu’au développement des radios libres et des privatisations des chaînes de télévision. A partir de ce moment-là, ce sont les taux d’audience pourvoyeurs des recettes publicitaires qui ont pris le pouvoir sur les programmes. Ces derniers ont été dirigés par de nouvelles « élites »qui comprenaient le système culturel et surtout émotionnel de la masse de la population. Exit les lettrés du champ médiatique. La télévision française est devenue aussi médiocre que la télévision américaine ou italienne. Un espoir toutefois, au Père Lachaise je rencontrai également une mère de famille et trois adolescents. Je lui demandai « Qui cherchez-vous ? »

J’étais prête à les suivre si c’était Modigliani… « Héloïse et Abélard » me répondit-elle. Si une mère de famille emmène ses ados voir la tombe d’Héloïse et Abélard, on peut espérer encore de l’humanité.


Balzac  Musée de Tours
Balzac - Musée de Tours

J’ai été très touchée par la tombe de Chopin. C’était une des tombes les plus fleuries. On sentait que chaque jour, des fidèles reconnaissants passaient par là et venaient ainsi témoigner leur admiration à ce grand musicien des variations de l’âme humaine… De son côté, Balzac ou même Yves Montand et Simone Signoret, deux icônes cinématographiques du 20ème siècle, ne bénéficiaient que de deux bouquets datant de plusieurs semaines. Quant à Delacroix, son catafalque austère n’invite pas à fleurir sa tombe. Heureusement, il bénéficie d’une allée à son nom, seul signe de reconnaissance à son grand talent.



Chopin au Père Lachaise ( Photo A. Prost)
La tombe de Chopin au Père Lachaise ( Photo A. Prost)


Annie Prost - Décembre 2011


27 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout

Comments


bottom of page